Naviguez sur un trimaran 60 pieds ORMA, un monocoque 60 pieds IMOCA et un maxi-catamaran 74 pieds G-Class avec les complicités d'Alain Gautier
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Une nouvelle saison vient de commencer ! Les participants s’expriment déjà.

Il est 9:30, on décolle, le rendez vous est fixé à 11:00 en rade de Lorient à “la Base”. J’enfourche le vélo de Corentin, un peu petit mais ça va le faire. Armel a accepté de me servir de guide, ça me permet de ne penser à rien: le suivre, juste le suivre. Mon gros sac me scie les épaules. Mais qu’est ce que tu as foutu là dedans ? C’est qu’il pédale vite le bougre !

D’abord le bruit des mouettes, puis l’odeur de la mer. La tyrolienne de la Base, le musée Tabarly, Armel me laisse. Mes pieds sur le ponton, ce bruit familier, les lames qui sonnent les unes après les autres, musique chère à mon cœur. Alain G. est en train de préparer le bateau. Sensation Océan, ex-Foncia, la moitié de mon âge, né en 2002, quelques milliers de miles au compteur. Je peux t’aider ? “Non ça ira, le rendez vous est à 11:00 au container”. Avare de mots, un vrai marin.

Je me balade sur les pontons à regarder les mini six cinquante de nouvelle génération. Presque que des carènes “Scow”, c’est peut être efficace mais qu’est que c’est moche!

10:55, je me dirige vers le container, nous serons 8 passagers et 1 équipier de pont en plus d’Alain G.. On enfile nos gilets.

Il est là, majestueux, aussi large que long, imposant, son mât semble toucher les nuages. Je laisse sur le quai les peurs et les doutes qui m’habitent, les nuits trop courtes de ces derniers mois, mes colères contre ce monde débile aussi. Je suis là, sourire au lèvre, je suis bien. Je grimpe sur la coque, rebondit sur le trampo, je suis un enfant devant une sucrerie, Neil descendant sur la lune, un adulte qui réalise un vieux rêve.

Brief sécu. Sacs en soute. Le Diesel tousse, le soleil perce les nuages, la mer scintille, nous sommes partis. “Des volontaires pour monter la grand-voile ?”. J’en suis. Moulin à café, plus dur que je ne pensais, une éternité, j’ai mal à l’épaule droite. Alain G me tend la barre. “Tu veux barrer ?” Non, jure ? Le contact du manche me surprend, c’est laqué de blanc, çà fait métalique, lisse mais tiède: du carbone évidemment. Sortir de la rade de Lorient à la barre d’un ORMA 60: çà pétille dans l’estomac. Combien entre les tourelles de la rade ? Pas d’idée, 100m peut-être ? En tout cas, c’est impressionnant, j’ai l’impression qu’on prend toute la largeur: sans doute moins d’un tiers en réalité.

Nous sommes dehors. Il n’y a pas de vent, tu parles, ça n’empêche pas le trimaran de glisser, 8 nœuds, 10 nœuds, 12 nœuds. C’est plus que je n’ai jamais fait avec Insuline, mon petit Trimaran de 1982 quand j’ai eu l’impression de voler. Avec cette bête là, on a l’impression d’être au point mort. “Vise la tourelle blanche et noire”. C’est souple, on dirait un dériveur, 6 tonnes qui réagissent à la moindre pression. Je ne résiste pas à l’envie d’abattre un peu pour prendre de la vitesse, 15 nœuds.

On dépasse les dernières bouées rouges et vertes, le chenal est derrière nous. “On va virer, tu pousses à fond et je reprends la barre de l’autre côté”. Je pousse. “ Bien ton virement, quelqu’un d’autre va prendre ta place”. Pas de regret, l’île de Grois, la mer, la rade, les reflets du soleil qui pointe son nez de temps à autre. Je peux aller devant ? “Pas de soucis”. j’adore marcher sur le trampoline. Aller devant, debout sur la proue, je suis le roi du monde, mon monde intérieur. “Olivier, on va virer”. Je reviens à l’arrière, ça rebondit, je suis un gosse sur la costa del sol.

Quand décide-t-on de mettre les foils ? “C’est juste une question de vitesse, on ne va pas tarder”. La classe ORMA n’autorise pas les foils à plan porteur en 2002, les foils sont là juste pour alléger le flotteur sous le vent. Tu m’étonnes, on accélère, la coque centrale se soulève, on sort presque intégralement la dérive, 22 nœuds, whaou. On se dépose doucement, la risée est passée, trois minutes suspendues au souffle d’Eole, une éternité. 18 nœuds, le barreur lofe.

Je retourne à l’avant, on abat à nouveau, le bateau chante, les haubans vibrent, je frissonne et pourtant je n’ai pas froid. 25 Noeuds, synesthésie sensorielle, tout y est: le vent sur mon visage, le froid du kevlar sous ma main droite, les gerbes d’eau de la coque tribord plein les yeux, la proue qui vibre sous mes pieds, me traverse et finit par me faire chanter: Yeeeeeeeeee…aa. Je chante mon émotion et pour une fois, je ne suis pas le seul.

Combien ai-je fait d’aller retour sur le filet? 5 ? 10 peut-être ? je ne sais plus. Suffisamment pour que mes jambes se rappellent la sensation de flotter, la Sensartion Océan (Petit placement de produit). Tout le monde a barré ? “oui” Je peux reprendre un peu la barre ? “oui”. Pas de mots inutiles, ça me suffit, je reprends le manche pour quelques miles, je suis heureux. Retour au port, il va falloir rendre la barre. On roule le Génois. C’est finit.

On débarque dans le semi-ridige, le trimaran reste en mer. Je crois que je vais rester sur mon nuage jusqu’à ce soir. Je n’ai pas pris beaucoup de photos mais peu m’importe, les souvenirs sont ici et là bien au chaud. Merci de m’avoir offert cette belle parenthèse! « Un Zebre en couleur » à bord du trimaran le 12 avril 2025

C’est le 12 avril 2025 ; nous avions hâte , Ça y est ! ;
Nous sommes à bord, au milieu de la rade baignée du soleil d’avril. Le temps d’une courte lutte au moteur contre le vif courant dans le chenal, la Grand voile est hissée. Nous dépassons la Jument puis serrons vers Gâvres pour abattre ensuite bâbord amure et dérouler la voile d’avant.

Ça y est, la risée de Gâvres est au rendez- vous. Le flotteur bâbord se lève avec fierté, il sourit, l’équipage l’accompagne.
Mât incliné, bordure au vérin, cunningham aux petits oignons, et point d’écoute remonté au vent à « zéro », génois réglé, comme près serré « comme jamais »; la coque centrale s’élève avec assurance et majesté.

Le clapotis de l’étrave se métamorphose en un frémissement de plus en plus assuré pour défiler promptement avec conviction . L’ORMA accélère 18, 20, 22,9 nœuds. Sensation de vitesse, de puissance, d’assurance, dans une impression d’ harmonie entre le vent, la mer, la machine, l’homme. La maîtrise d’Alain est palpable.

Pendant la recherche du vent un peu perdu, entre La pointe du Talut, Brigneau, Pen Men, chacun barre, l’exercice est réussi par tous, le trimaran est honnête et équilibré. Dans une molle insistante, le gennaker rouge ranime le bateau et l’équipage.
Sa confiance s’ intériorise en lui.
Une grosse masse nuageuse venue du Sud se propage vers nous; Alain prend le manche et vient chercher le vent qu’elle crée jusqu’à s’y frotter judicieusement.

Ça y est ! La machine reprend vie, s’anime, s’élève, la coque centrale haute, donne son meilleur, flotteur au vent élevé, fier comme un étendard. L’équipage savoure.
Le vent forcit, tout s’accélère, 25, 29 nœuds, le flotteur sous le vent nous porte, serein. Le vent, l’eau, le carbone, le gréement, l’équipage vibrent… 31 nœuds – dans une superbe glissade ou le temps ralentit ou s’accélère.
Je ne sais plus.
C’était bien, si bien.
Nous rentrons pleine balle.
C’était à vivre.
Michel Petitot à bord du Trimaran Sensations le 12 avril 2025

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